Le terme « tuffeau », attesté en 1466, est dérivé du latin « tofus» ; lui-même provenant du grec « tuphros » qui indique une roche friable. Il désigne une craie plus ou moins siliceuse blanche à jaunâtre, emblématique du Val de Loire. Il est probable que ce terme ait été inspiré par les architectes italiens, du fait que, comme certaines roches volcaniques dont la tuf, elle peut être découpée à la scie.

Toutefois, le tuffeau est une roche sédimentaire, datée du Turonien (-94 à -90 Millions d’Années). Elle trouve son origine au fond d’une mer chaude à très chaude (jusqu’à 37°) à une époque où les terres émergées étaient peu étendues et la teneur en dioxyde de carbone élevée dans l’atmosphère. Dans cette mer peu profonde se dépose une boue calcaire composée d’argile, de sable et surtout des restes d’organismes marins, dont essentiellement des débris d’algues calcaires (les cocolithophoridées). Au fil du temps et sous l’effet de l’accumulation des terrains, cette boue va se compacter pour former au final une roche tendre, poreuse, légère, et facile à creuser. Un centimètre de cette roche correspond à 300 années de dépôts ; ce qui, sur l’ensemble de l’étage Turonien (94 à 90 millions d’années) abouti à une épaisseur d’environ 100 mètres. Le tuffeau n’est toutefois pas une roche homogène ; sa composition change avec le temps en fonction des variations climatique, et géographiquement. Géologiquement parlant, le tuffeau correspond au stratotype Turonien entre Saumur et Montrichard, et peut en effet se répartir en un ensemble autour de Saumur d’une part, et en Touraine (s.l.) d’autre part.
A Saumur, on distingue au-dessus d’une lumachelle correspondant à la fin du Cénomanien :
- Le Tuffeau des Ardilliers : légèrement argileux, gris pâle, se débitant en plaque métrique en partie centrale. Il trouve son origine sans un milieu hémipélagique (proche du continent) ;
- Le Tuffeau de Saumur, comprenant : un niveau inférieur homogène, sans silex, qui représente le cœur du tuffeau exploitable sur une épaisseur de 7,5 mètres à Saumur et est surmonté d’un lit métrique très coquillier qu’on surnomme le « liron ». La partie supérieure de ce niveau est constitué d’un tuffeau dit « à chenard », qui correspondent à des silex. Ces derniers résultent de la cristallisation de silice provenant d’éponges ou d’organismes microcellulaires comme les radiolaires, dans les terriers d’animaux fouisseurs (thallasinoïdes) ;
- Au-dessus, le Turonien supérieur correspond grosso modo à la formation des Sables de Saint Hilaire ; laquelle trouve son origine dans une zone littorale et comprend des sables fins, des carbonates (en moindre quantité) et des argiles dont la glauconie qui lui donne une teinte verdâtre.
En partie Est de la Touraine, on note :
- La Craie d’Amboise, riche en argile, correspondant au Turonien inférieur et une petite partie du Turonien moyen. Elle a été exploitée pour la fabrication de la chaux hydraulique ;
- Le Tuffeau de Bourré, comprenant à la base une dizaine de mètres de tuffeau homogène, sans silex excepté en partie médiane, puis un niveau supérieur à chenards ;
- Le Tuffeau Jaune, correspondant au Turonien supérieur, beaucoup plus hétérogène. On y note de nombreux hard grounds induisant des niveaux très siliceux et très durs, et des tempestites résultant d’une mer très agitée avec des lits entrecroisés. La limite supérieure est marquée par des tempestites bioturbées, un enrichissement en glauconie ou l’apparition de silex en dalle.
Le tuffeau a fait l’objet d’une extraction commencée dès l’antiquité, et devenue particulièrement active à partir du XIème siècle. Sa facilité à être exploitée et taillée, sa relative légèreté et sa beauté en ont fait une pierre de choix pour les constructions bien audelà de sa région d’origine, jusqu’en Angleterre et aux Antilles. Parallèlement à cette extraction se sont développés d’importants réseaux de carrières, plus ou moins grandes, aménagées ensuite et au fil du temps en habitats troglodytiques, dépendances, caves viticoles, champignonnières… et même en demeures seigneuriales ; avant d’être transformées, plus récemment, en restaurant, gîtes, musées et autres sites touristiques.
Mais le tuffeau est aussi, dans son ensemble, une roche fragile, évolutive et particulièrement sensible à l’eau. Elle est poreuse et, en s’infiltrant dans le tuffeau, l’eau charge en poids la roche, augmentant sa densité jusqu’à 30% ; réduit sa résistance mécanique, jusqu’à 40%, accélère son altération de la roche, notamment par les molécules (acides entre autres) qu’elle véhicule et facilite, lors des périodes de gel et principalement pour les coteaux et entrées de caves exposés au nord et à l’est, l’éclatement de la roche.
Qu’il soit en place (caves, carrières) et extrait, le tuffeau nécessite une d’être surveillé, protégé et renforcé à bon escient.